" L'écriture est née de l'image, c'est pourquoi elle a vocation de s'y associer de nouveau. Si la formule de texte et image peut avoir une signification, c'est à condition que l'on reconnaisse dans ce "et" non pas la marque indifférente d'une collaboration accidentelle mais l'indice du lien essentiel qui existe entre les éléments hétérogènes du visible réunis sur un même support qui est à l'origine de l'écrit. Mais pour cela il est indispensable aussi d'admettre que regarder ne consiste pas à identifier des objets ou à tuer l'autre, mais à comprendre les vides, c'est à dire à inventer. "
Anne-Marie Christin, "Le Texte et l'image", dans L'Illustration, essais d'iconographie, Klienksieck, 1999, p.37.
Mots et images interagissent obligatoirement, notamment dans la double page. Hormis peut-être les cas de l'abécédaire ou de l'imagier, il est essentiel d'éviter les redondances. On peut noter différents types de relations entre textes et images dans l'album, telles que des mises en pages dissociatives, associatives, ou conjonctives. Et, selon Marion Durand et Gérard Bertrand (L'Image dans le livre pour enfants, Paris, L'Ecole des loisirs, 1975), on peut mettre en évidence trois fonctions du texte vis à vis de l'image :
- Fonction de délimitation (texte faisant office de support plastique dans la mise en page de plusieurs images)
- Fonction de révélateur (texte permettant de comprendre les images)
- Fonction de complément (texte complétant l'image en comblant ses lacunes et en dissipant ses ambiguités)
Sylvie Eckert, Professeur des Ecoles, Le Rapport Texte / image dans un album, http://www.crdp.ac-lyon.fr/LE-RAPPORT-TEXTE-IMAGE-DANS-UN.html , extrait :
" Il existe en effet différentes articulations possibles entre le texte et les illustrations d’un album ; ce dernier est « un tout, constitué de textes et d’images, plus ou moins solidaires. Plusieurs cas de figure peuvent se rencontrer :
a. Le texte constitue un objet autonome et les images ne fonctionnent que comme des illustrations : l’auteur du texte et l’illustrateur sont souvent des personnes différentes (on peut trouver plusieurs illustrateurs différents pour un même texte).
b. Le texte présente des incomplétudes que comblent délibérément les images : le projet est un projet global qui suppose que l’auteur du texte et l’illustrateur soient une même personne ou qu’ils aient travaillé en étroite complicité sur un projet commun.
c. Le texte est en contradiction volontaire avec les images […]) : les rapports de l’auteur du texte et de l’illustrateur sont en général les mêmes que précédemment. "
" Aspects formels :
Dans l'album, textes et images parfois s'ignorent, se contredisent... mais ils ne peuvent être complètement cloisonnés ni séparés. Présents conjointement dans un espace unique, celui de la double page, ils se trouvent appréhendés par un même regard et entrent nécessairement en relation d'un point de vue formel. Il s'agit donc d'apprécier la mise en espace de ces deux langages, leurs caractéristiques propres, leurs dispositions, les effets de résonance ou de contraste... Car à ce strict niveau formel, se jouent déjà de nombreuses implications en terme de narration et de discours. "
Sophie Van der Linden, Lire l'album, Le Puy-en-Velay, Atelier du poisson soluble, 2006, p.92.
On peut noter la différence entre représentation iconique et signe plastique : ainsi, l'imagier serait composé d'images davantage de type référentiel, alors que le livre artistique est constitué d'images plastiques, littéraires, de type expressif. Cependant les deux peuvent être liés :
Lily Franey, Alain Serres, Olivier Tallec, L'Abécédire, Rue du Monde, 2001.
Ce qui conduit à penser quatre codes, selon Sophie Van der Linden : linguistique, littéraire, iconique, plastique dont les interactions produisent des démarches diverses : intégration de tout ou partie du texte dans l'image, choix formels et colorés de la typographie en fonction d'un sens, ou intégration discrète.
Thierry Lenain, Olivier Tallec, Il Faudra, Sarbacane, 2004.
Le statut des onomatopées fait qu'elles se frayent un chemin entre texte et image.
Bruni Heitz, Badaboum, Circonflexe, 2002.
Jean Alessandrini explique : " il existe (...) une occasion_ si particulière qu'elle en est exceptionnelle_où la typographie parvient à concerner l'illustrateur. C'est lorsque l'image elle même se construit à partir des mots... Lorsque le mots devient image et que l'image devient mot."
Jean Alessandrini, Le Zapoyoko, Bayard éditions, 1983, J'aime lire, N°83.
Anne Quesemand Laurent Berman, Le Colporteur d'images, Alternatives, 1997.
La typographie et l'image se combinent chez Joël Guenoun qui propose des "mots-images".
Joël Guenoun, Les mots ont des visages : elle,Paris, Autrement,col. Jeunesse, 1999.
Importance du caractère iconique du texte : typographie expressive, par le choix simple d'un corps, par le choix d'une police de caractère, etc.
Antonin Louchard, Pat, Albin Michel Jeunesse, col. Zéphir, 1999.
Christian Voltz, Toujours rien ?, Editions du Rouergue, 1997.
Ainsi, Robert Delpire, lors de la conception de l'album Les larmes de crocodile (vu à paris à la Maison Européenne de la photographie lors de l'exposition Delpire & Cie, pendant notre dernier séjour) fait des choix typographiques très approfondis.
Neal Layton, Oscar et Arabella, Gallimard Jeunesse, 2002.
Dans les relations entre typographie et image, on peut aussi constater l'intégration totale entre typographie et image dans le travail de Bénédicte Guettier.
Bénédicte Guettier, Ben Gué dessine comme un cochon, Gallimard jeunesse, 2000.
Pulak Biswas, Anushka Ravishantar, Où est le tigre ?, Syros, col. Les Ethniques, 1999.
Ibid.
Ibid.
Béatrice Poncelet, Chez elle ou chez elle, Seuil, 1997.
Ibid.
Ibid.
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