18 avr. 2009

Le contexte "OYYO"

CONTEXTE

Club Med branche les jeunes avec Oyyo
Marketing Magazine N°58 - 01/03/2001 - Isabel Gutierrez
Le Club Med lance son premier village branché. Un concept axé sur la fête et le sport, mais également sur de petits prix et un mode de réservation par Internet. Il ouvrira ses portes le 15 mai prochain en Tunisie. Le voyagiste en prévoit une dizaine d'ici cinq ans.

"Si tu dors, t'es mort". C'est la promesse d'Oyyo, la nouvelle marque du Club Med destinée à attirer les 18 - 30 ans qui font défaut au voyagiste. Cadres en mal de repos s'abstenir. Le village annonce la couleur, on n'y vient pas pour dormir mais pour faire du sport et surtout la fête jusqu'au bout de la nuit. « Nous avons voulu inventer un concept autour de ce qui fédère les jeunes aujourd'hui. Le sport, la musique et Internet, explique Maria Outters, directrice générale de Club Med Bazic SA, filiale à 100 % du célèbre club. Il faut leur apporter plus de souplesse et de liberté. Tout en prenant en compte la dimension d'échange et d'amusement. » Exit donc les animations et les plages horaires imposées. Oyyo propose des petits-déjeuners jusqu'à 14h 30 ou des merguez sur la plage à cinq heures du matin. Mais ce n'est là qu'une des nombreuses innovations du concept. La politique tarifaire a été revue à la baisse et simplifiée autour de trois offres : 300, 400 ou 600 euros selon les périodes de départ allant du 15 mai au 9 octobre (de 1 800 à 3 600 francs). Le voyagiste mise également beaucoup sur son nouveau site Oyyo.com pour informer sa clientèle gourmande d'Internet et lui permettre de réserver en ligne, paiement sécurisé à l'appui. Il a parallèlement ouvert un numéro Indigo ainsi qu'un centre d'appels dédié. Le tout relayé par une boutique d'un nouveau genre sur le très parisien Boulevard Saint-Michel, mélange d'agence de voyages, d'open bar et de web bar. La communication, signée FCB 20/80, accompagne le lancement avec une campagne décalée très ciblée dans le choix des médias. La moitié des investissements est consacrée à des radios musicales comme NRJ, Voltage, RTL2, SkyRock ou Fun, partenaire privilégié. On peut entendre un samouraï un peu bizarre scander un Oyyo, nom créé de toutes pièces en partenariat avec l'agence Nomem, com-me une sorte de cri de ralliement. Une vague sauvage d'affichage sur de très nombreux supports gratuits ainsi qu'une présence dans les cités universitaires, bureaux des élèves ou restaurants universitaires, complèteront le dispositif tout comme la distribution de flyers dans des boîtes de nuit. La deuxième vague d'affichage classique en 4 x 3 dans le métro parisien, prévue au mois d'avril, devrait rallier plus fortement les jeunes avant la haute saison. En tentant d'imposer Oyyo comme l'endroit idéal pour faire la fête sous le brûlant soleil méditerranéen.

LA FÊTE NE S'ARRÊTE JAMAIS

Car la grande promesse d'Oyyo, c'est la fête. Une fête énorme, à l'image du night-club de 1 500 m2 placé au centre du village et qui sera bichonné par des spécialistes du son, de la lumière et des accessoiristes. Une fête branchée également qui sera rythmée par deux DJ résidants, DJ Loran et DJ Style. Et qui accueillera outre des invités internationaux, des DJ venant des boîtes de nuits parisiennes comme Les Bains ou le Bus Palladium ainsi que des groupes connus ou de nouveaux talents. La fête est aussi prévue tribale avec des événements relayés par le site internet qui annonce la "semaine de la musique" en présence de poids lourds des nuits parisiennes pour l'ouverture officielle du Village du 30 mai au 3 juin. La fête s'associe également au sport avec les jeux collectifs traditionnels comme le beach-volley, le basket, le beach-soccer voire la pétanque. Mais aussi des animations créées de toutes pièces comme le Ouga Bouga, embarcation à mi-chemin entre une pirogue et un drakkar où huit personnes rament au rythme d'un tambour ou le Winplot, quelque part entre le jeu de l'oie, le base-ball et la balle au prisonnier. Pour ne citer qu'eux. Oublié en revanche, le traditionnel spectacle du soir ou le tir à l'arc et les "Gentils Organisateurs", terme trop directif et vieillot, qui sera avantageusement remplacé par le titre de "Maître de Cérémonie", véritable metteur en fête, et une trentaine d'animateurs pour veiller au bien-être général, coordonner les événements et innover. Et ces derniers ne manqueront pas de travail car le nouveau village de Bekalta à 30 km environ de Monastir s'étend sur trente hectares et pourra abriter 1 700 personnes. Soit 500 de plus que la moyenne des villages du Club. Cette capacité d'accueil importante devrait lui permettre de réaliser des économies d'échelle et d'amortir plus rapidement son investissement d'un montant tenu secret. Mais que l'on imagine conséquent compte tenu de la création ex nihilo de l'infrastructure et des aménagements en matière d'environnement. L'énergie est produite à 40 % par des panneaux solaires, l'eau épurée directement dans une station interne et les déchets compactés sur place. Ce lancement s'inscrit plus largement dans la politique de segmentation entreprise par Philippe Bourguignon, P-dg du Club Med, qui a lancé successivement Club Med Affaires et Club Med World et compte bien profiter de la personnalité et de la notoriété du Club pour segmenter son image autour de cibles différentes.
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Grave party à Oyyo
Next (Libération) 06/07/2001 à 23h59
«Si tu dors, t'es mort», promettait la pub du Club Med: une formule jeunes avec musique de 10 h à 5 h du matin. Après un vol cahotique, une semaine pizza-pâtes et techno-reggae dans un village en chantier.

par FAURE Sonya
Bekalta (Tunisie) envoyée spéciale

Roissy, mardi. Dans la salle d'embarquement, ils sont 350, étudiants en droit (bermuda), banlieusards (pantacourt à ourlet sur le mollet), barmans lyonnais (lunettes à verres bleus) ou lycéennes (déjà bronzées) en attente de l'oral du bac. Ils peaufinent un air décontracté (mâchouillement de chewing-gum, main sur la hanche), prêts à relever le défi de la dernière invention du Club Med, un club pour les 18-35 ans : «Oyyo, si tu dors, t'es mort!» Le décollage est prévu à 17 heures.

Embarquement. Un tour de piste, deux tours de piste, trois quarts d'heure de tour de piste... «Veuillez débarquer, l'avion a un problème technique.» Gros soupirs, quelques rires: «C'est pas grave, il y a une bonne ambiance...» Un groupe du Val-d'Oise sort le ghetto blaster; on ouvre les bouteilles achetées au Duty Free. Steve, blondinet coiffé à la surfeur, se fait remarquer: dans son sac, quatre boîtes de préservatifs («Quatre fois douze, quarante-huit, j'ai prévu pour la semaine...»).

«Oyyo, si tu décolles, t'es fort!», devient le nouveau slogan. Annonce: «Les personnes en état d'ébriété ne seront pas admises dans l'avion.» Un type rougeaud et torse nu s'inquiète: «Dites madame, qui va vérifier notre état d'ébriété?»

L'avion décollera finalement le lendemain à 15 h 30. Avec l'étrange impression d'avoir voyagé au bas mot jusqu'en Polynésie, les clubbers gagnent la navette en direction du village tunisien de Bekalta. Le bus s'arrête devant la grille. «C'est ça Oyyo?» Des palmiers sans feuilles, des câbles qui serpentent dans le sable, un bâtiment en béton pas encore peint... «Bienvenue à Oyyo!», hurlent les haut-parleurs. Chacun traîne sa valise vers son tipi (vert, jaune ou bleu, les blancs sont encore en chantier): une baraque en bois peint de 12 m2 avec toit de toile. A l'intérieur, deux lits («qui s'assemblent d'un simple clic»), six portemanteaux et un balai.

Jeudi. MC Jon, le «maître de cérémonie» fait son discours de bienvenue: «Salut à tous, j'espère que vous allez vous exploser! Pour séduire son nouveau coeur de cible ­ vous! ­ le Club Med a créé Oyyo autour d'un concept d'intemporalité: à n'importe quelle heure vous pouvez aller sur la plage ou danser, vous prendrez votre petit déjeuner quand votre voisin mangera un steak!» Le «coeur de cible» reste impassible. «On a tous envie de faire la fête à Ibiza ou Saint-Trop', mais on ne peut pas tous entrer dans les boîtes select... Le club n'est pas fini (derrière lui passe une tracto-pelle) mais les soft drinks sont gratuits!» Applaudissements nourris.

Vendredi. Entre l'happy hour et la fête de la nuit sur le «mixing» (la piste de danse en plein air), diffusion du premier journal télévisé d'Oyyo sur écran géant : «En ouverture de notre JT, le ministère des Affaires culturelles nous a obligés à vous montrer un documentaire sur le village de Bekalta...» Trois Tunisiens à mobylette et une voix off façon Jules-Edouard Moustic sur Canal +: «Cette charmante bourgade compte son rassemblement de motards et ses autoroutes ultramodernes! (à l'image un chemin de terre). Mais Bekalta, c'est surtout... Oyyo!» Hurlements de joie, gogo dancers à gros seins à l'écran.

Steve, désormais surnommé Durex, rejoint une jolie brune sur le mixing. La nuit tombée, même les palmiers étêtés ont de l'allure. Les tromboscopes zèbrent la piste de danse (1 500 m2). Autour, les bungalows, éclairés de l'intérieur, se métamorphosent en photophores et grincent comme le pont d'un bateau.

Sous le chapiteau du restaurant, des pompiers et une école d'ingénieurs rejouent Full Monty. Un petit groupe joue au basket. Juste à côté, sur le mixing, on s'explose sur My benz benz benz de NTM, Cette soirée-là de Yannick ou Début de soirée. Les rares amateurs de techno apprécient DJ Fred, invité de la semaine. Pour les autres, «il fait trop boum boum». Steve entame l'approche d'une fille coiffée d'un foulard.

Il est cinq heures, l'heure du lever de soleil et l'objectif ultime des «Oyyoyistes». Les corps courbaturés s'enlacent sur la plage. Style, le DJ permanent a pris le relais: «Le soleil se lèvera dans une demi-heure... dans dix minutes...» Six heures, bruyant retour au tipi. Un voisin de bungalow, un commercial au look «sortie de lit» ultra-étudié, tire un amer constat de sa stratégie: «J'ai déconné en sortant avec une GO la première semaine, maintenant je suis grillé avec toutes les filles...»

Samedi. «Il est onze heures, nous allons commencer notre réveil musculaire!» Sur le mixing, cour de gym: «Et un, et deux, tu tournes, et un, tu lèves... A 15 h 30, aquagym: on «s'explose» en s'éclaboussant. A 17 h, step: «Et un, et deux, tu tournes, et un, tu lèves...» Après c'est beach volley, foot, courses de Ouga bouga (des pirogues-drakkar) ou de hipflot (embarcations en forme de phallus jaune très difficiles à manier). Sans compter les jeux de plage: «Les garçons vous prenez une fille dans l'eau... Non, ne la prenez pas devant tout le monde, je vous demande juste de la soulever...» Steve est à l'affût entre les serviettes. Françoise, l'infirmière, se penche sur le pied d'une fille, entaillé par une tige en métal rouillé. «On a agrandi la plage, explique-t-on. Mais il reste des traces du chantier...»

Dimanche. Un terrain de basket a surgi du sable. Le revêtement de sol du restaurant n'est pas tout à fait sec. Il faudra aussi penser à retaper le tipi que ses occupants ­ ivres ­ ont détruit la semaine dernière avant d'être expulsés. Un groupe d'ouvriers tunisiens plante des bambous autour des «thermes»: des douches et des lavabos en plein air. Un malin profite du jeu de miroirs pour faire un clin d'oeil à une jolie fille, dentifrice aux lèvres. Sa voisine persiste dans le brushing et les talons aiguilles quand d'autres ont capitulé et opté pour le paréo et les dreadlocks de sel et de sable.

Lundi. Une bande de débrouillards a loué un bateau à Bekalta et rameuté trente-cinq désoeuvrés pour une croisière d'un jour. On a beau se répéter «ça va, c'est que 2 000 balles...», la nourriture finit par lasser (steak-frites, pizza-pâtes le midi sous 40° C), on a fait le tour des activités et la musique devient rengaine. Certains avaient demandé au staff de baisser le son, porté par des haut-parleurs de dix heures à cinq heures du matin. Réponse de DJ Style: «Le slogan c'est "Si tu dors t'es mort." Il était marqué dans les publicités, sur la convoc' et à l'entrée du club...» Verdict d'une oyyoyiste: «Ici, c'est comme une secte qui te ferait aimer la techno.»

Un trio d'ingénieurs est unanime: «Finalement, heureusement qu'on est arrivés avec un jour de retard...» «Dans les autres Club Med, tu as l'air con pendant cinq minutes à faire les signes démentiels (2), se lamente un parapharmacien trentenaire. Mais après, il y a un vrai esprit de communauté...». A Oyyo, on reste en petits groupes, voisins de tipis ou rencontres de la nuit.

Mardi. Dans l'avion une jeune fille pleure la plage ou l'amour perdu. On échange les adresses. «ça va faire comme l'armée. On gardera que les bons souvenirs», philosophe Enzo, corse et dragueur de profession en mer Méditerranée. Un ingénieur a marchandé dans le souk une main de Fatma pour conjurer les retards de l'avion au retour. Steve revient avec ses quatre boîtes de préservatifs intactes. «La semaine gratuite qu'ils m'ont offerte pour les 24 heures à l'aéroport, je vais peut-être l'offrir à une copine », conclut Nadia, 19 ans, barmaid à la Bastille à Paris. Quitte à revenir dans les autres Oyyo que le Club Med prévoit d'ouvrir au Maroc et en Espagne. Ou quand les palmiers auront des palmes.

Photos Marie Barlois

(1) A terme, le club de Bekalta aura une capacité d'accueil de 1 600 personnes.

(2) Gestes rituels des Club Med traditionnels.
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Oyyo : ouille ouille!
(Article initialement diffusé sur les weblogs de 20minutes.fr, en avril dernier)/


La dernière tentative navrante du Club Med' pour séduire la jeunesse branchée et dansante s'est soldée par un... arrêt de projet. Provisoire dixit la direction. Of course.

Le Club Med ravale ses aigreurs en ce moment : le concept vieillit, peine à dénicher de nouveaux clients dans la jeunesse... Le Fig Eco du mardi 15-04 nous apprenait ainsi que l'empire des vacances familiales va éteindre progressivement son concept et son produit Oyyo. Mais le journal ne racontait pas grand-chose là-dessus, expédiant vite fait la question.

Vous ne vous souvenez pas de cet Oyyo au nom sympa? Lancé en plein boum de la nouvelle économie, avec un sous-titre d’une finesse hyper prometteuse («Si tu dors, t’es mort !»), il s'agissait d'un club "nouvelle génération" situé près de Monastir en Tunisie . Une accroche pour d'jeunes cadres sup’ stressés, élevés dans la culture techno-rave, malades sans un lecteur MP3 et un accès web, adeptes du speed dating et possesseur de carte bleue maousse kosto. On promettait alors de la musique chébran, de la fête, de la boisson alcoolisée, de la rencontre et de la fesse facile, le tout 24h24, quatre ou cinq jours durant, jusqu’à l’overdose. On voyait poindre l’intention marketing derrière : récupérer cette mode de la « free party », des raves sauvages pour jeunesse cool et sans envie bourgeoise. Et cette fois, on les ferait payer pour se torcher! Magnifique, mais juste sur le papier.

Singulier raccourci en effet que ce concept à la gomme, qui avait oublié quelques règles fondamentales de bon vendeur : les jeunes n'aiment pas forcément qu'on leur montre un endroit sur l'air de "voila c'est pour vous les d'jeunes, allez-y, éclatez-vous!"; un lieu de nuit branché ne s'autoproclame pas, mais le devient à la force du talent ou du hasard; danser plus de 3 heures est vraiment très très chiant, surtout par 40 degrés, etc. C'était aussi réduire la jeunesse comme juste apte à la beuverie, incapable de tourisme culturel, de désir d'évasion simple.

Résultat : Oyyo fut un cuisant échec. Même les premiers reportages télévisés ou écrits sur la question ne purent que montrer la catastrophe dans tout son éclat : des villages finis à la truelle de chantier, mal décoré, dans un décor cliché ; des clients désabusés, tentant tant bien que mal de se convaincre que leurs vacances n’étaient pas ratées. Question au passage : la sous-marque du Club Med’ va t-elle garder la petite agence qu'elle avait par exemple ouvert sur le Boul'Mich à Paris (temple du monde étudiant)? Je passais justement devant il y a quelques semaines (avril dernier), constatant le vide intersidéral des lieux, derrière une vitrine exempte de toute promos et propos. A l'intérieur un malheureux baby-foot avait été disposé... Sans joueurs endiablés, comme dans les bars du coin.

Mais gageons que l’empire du vacancier moyen ne devrait pas en rester là. Déjà, sur le site web d’Oyyo, le Club Méd’ parle en fait juste d’une mise en sommeil pour cette saison liée au « contexte » international. Et d’ajouter, dans une langue de bois très maîtrisée : « Mais rassurez-vous, cette non-ouverture va être mise à profit non seulement pour continuer à faire progresser le produit OYYO pour l'été 2004, mais aussi pour développer et faire aboutir une réflexion globale sur le marché des jeunes adultes au sein de l'offre Club Méditerranée ». Que vont-ils donc nous sortir du chapeau du magicien, les sbires pensantes du nouveau boss du Club, Henri Giscard d'Estaing : une semaine dans un Club de Marrakech, avec 6 filles et 6 garçons, sous 32 caméras et retransmis à la télé ? Ou bien des mini parcs Vulcania dans chaque village de vacances ? Qui sait, ne riez pas d’avance…

LD
19 décembre 2003
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Documents complémentaires :
  1. Télécharger le concept board OYYO
  2. logo et signalétique
  3. Télécharger le book agence naco
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